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Esther
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numérique par JESUSMARIE.com révisée par mission-web.com
* Les passages deutérocanoniques (l'Esther grec) sont
indiqués à leur place, mais leur texte est renvoyé à la fin du
livre, comme dans la Vulgate.
*** Prologue :
voir fragment III, Ch. 11, 2-12, puis ch. 12, 1-6 ***
1 C'était au temps d'Assuérus, — de cet Assuérus qui
régna, depuis l'Inde jusqu'à l'Ethiopie, sur cent vingt-sept
provinces, —
2 au temps où le Roi Assuérus était assis
sur son trône royal à Suse, la capitale.
3 La troisième année
de son règne, il fit un festin à tous ses princes et à tous ses
ministres. Les chefs de l'armée des Perses et des Mèdes,
les grands et les gouverneurs des provinces furent réunis
en sa présence ;
4 c'est alors qu'il déploya devant eux la
riche splendeur de son royaume et l'éclatante magnificence de sa
grandeur, pendant un grand nombre de jours, pendant cent
quatre-vingts jours.
5 Lorsque ces jours furent écoulés, le
roi fit pour tout le peuple qui se trouvait à Suse, la capitale,
depuis le plus grand jusqu'au plus petit, un festin de sept jours,
dans la cour du jardin de la maison royale.
6 Des tentures
blanches, vertes et bleues étaient attachées par des cordons de
byssus et de pourpre à des anneaux d'argent et à des colonnes de
marbre ; des lits d'or et d'argent étaient posés sur
un pavé de porphyre, de marbre blanc, de nacre et de marbre noir.
7
On servait à boire dans des vases d'or de différentes formes, et le
vin royal était offert en abondance, grâce à la
libéralité du roi.
8 Suivant le décret, chacun buvait sans que
personne lui fît violence, car le roi avait ordonné à tous les
officiers de sa maison de se conformer à la volonté de chacun des
convives.
9 La reine Vasthi fit aussi un festin pour les
femmes, dans la maison royale du roi Assuérus.
10 Le septième
jour, comme le vin avait mis la joie au cœur du roi, il ordonna à
Maüman, Bazatha, Harbona, Bagatha, Abgatha, Zéthar et Charchas, les
sept eunuques qui servaient devant le roi Assuérus,
11 d'amener
en sa présence la reine Vasthi, couronnée du diadème royal, pour
montrer sa beauté aux peuples et aux grands, car elle était belle
de figure.
12 Mais la reine Vasthi refusa de se rendre au
commandement du roi, qu'elle avait reçu par l'intermédiaire
des eunuques, et le roi fut très irrité et sa colère
s'enflamma.
13 Alors le roi s'adressa aux sages qui
avaient la connaissance des temps : — car ainsi se
traitaient les affaires du roi, devant tous ceux qui étaient
experts dans la loi et le droit,
14 et les plus près de lui
étaient Charséna, Séthar, Admatha, Tharsis, Marès, Marsana et
Mamuchan, les sept princes de Perse et de Médie, qui voyaient la
face du roi et qui occupaient le premier rang dans le royaume. —
15
" Quelle loi, dit-il, doit-on appliquer à la
reine Vasthi, pour n'avoir pas exécuté l'ordre du roi Assuérus,
qu'il lui a donné par l'intermédiaire des eunuques ? "
16
Mamuchan répondit devant le roi et les princes : " Ce
n'est pas seulement à l'égard du roi que la reine Vasthi a mal agi,
mais aussi envers tous les princes et tous les peuples qui
sont dans toutes les provinces du roi Assuérus.
17 Car l'action
de la reine viendra à la connaissance de toutes les femmes
et les portera à mépriser leurs maris ; elles diront : Le
roi Assuérus avait ordonné qu'on amenât en sa présence la reine
Vasthi, et elle n'y est point allée.
18 Et dès aujourd'hui, les
princesses de Perse et de Médie, qui auront appris l'action de la
reine, la citeront à tous les princes du roi, et il en
résultera beaucoup de mépris et de colère.
19 Si le roi le
trouve bon, qu'on publie de sa part et qu'on inscrive parmi les lois
des Perses et des Mèdes, pour n'être pas enfreinte, une ordonnance
royale portant que la reine Vasthi ne paraîtra plus devant
le roi Assuérus, et que le roi donnera sa dignité de reine à une
autre qui soit meilleure qu'elle.
20 Et quand
l'édit du roi sera connu dans tout son royaume, qui est vaste,
toutes les femmes rendront honneur à leurs maris, depuis le plus
grand jusqu'au plus petit. "
21 Le conseil plut au
roi et aux princes, et le roi agit selon le discours de Mamuchan.
22
Il envoya des lettres à toutes les provinces du royaume, à chaque
province selon son écriture et à chaque peuple selon sa langue ;
elles portaient que tout mari devait être le maître dans
sa maison et qu'il parlerait le langage de son peuple.
1 Après ces choses, quand la colère du roi Assuérus se fut
calmée, il se rappela Vasthi, ce qu'elle avait fait et la décision
qui avait été prise à son sujet.
2 Alors les serviteurs du roi,
qui étaient en fonctions près de lui, dirent : " Qu'on
cherche pour le roi des jeunes filles, vierges et belles de
figure ;
3 que le roi établisse dans toutes les provinces de
son royaume des officiers chargés de rassembler toutes les jeunes
filles, vierges et belles de figure, à Suse, la capitale, dans la
maison des femmes, sous la surveillance d'Egée, eunuque du roi et
gardien des femmes, qui pourvoira à leur toilette ;
4 et que
la jeune fille qui plaira au roi devienne reine à la place de
Vasthi. " Le roi approuva cet avis, et il fit ainsi.
5
Il y avait à Suse, la capitale, un Juif nommé Mardochée, fils de
Jaïr, fils de Séméï, fils de Cis, de la race de Benjamin,
6
qui avait été emmené de Jérusalem parmi les captifs déportés
avec Jéchonias, roi de Juda, par Nabuchodonosor, roi de Babylone.
7
Il élevait Edissa, qui est Esther, fille de son oncle ; car
elle n'avait ni père ni mère. La jeune fille était belle de forme
et d'un gracieux visage ; à la mort de son père et de sa mère,
Mardochée l'avait adoptée pour fille.
8 Lorsqu'on eut publié
l'ordre du roi et son édit, et que de nombreuses jeunes filles
furent rassemblées à Suse, la capitale, sous la surveillance
d'Egée, Esther fut prise aussi et amenée dans la maison du
roi, sous la surveillance d'Egée, gardien des femmes.
9 La jeune
fille lui plut et gagna sa faveur ; il s'empressa de lui fournir
les choses nécessaires à sa toilette et à sa subsistance, de lui
donner sept jeunes filles choisies dans la maison du roi, et il la
fit passer avec elles dans le meilleur appartement de la
maison des femmes.
10 Esther ne fit connaître ni son peuple ni sa
naissance, car Mardochée lui avait défendu d'en parler.
11
Chaque jour Mardochée se promenait devant la cour de la maison des
femmes, pour savoir comment se portait Esther et comment on la
traitait.
12 Et quand arrivait pour chaque jeune fille le tour
d'aller vers le Roi Assuérus, après avoir passé douze mois à
accomplir ce qui était prescrit aux femmes, — et voici ce que
comportait le temps de leur purification : pendant six mois,
elles se purifiaient avec de l'huile de myrrhe, et pendant
six mois avec des aromates et des parfums en usage parmi les
femmes, —
13 et que la jeune fille allait vers le roi, on
lui permettait de prendre avec elle ce qu'elle voulait, pour aller de
la maison des femmes dans la maison du roi.
14 Elle s'y rendait le
soir, et le lendemain matin elle passait dans la seconde maison des
femmes, sous la surveillance de Susagaz, eunuque du roi et gardien
des concubines. Elle ne retournait plus vers le roi, à moins que le
roi ne la désirât et qu'elle ne fût appelée nommément.
15
Lorsque son tour d'aller vers le roi fut arrivé, Esther, fille
d'Abihaïl, oncle de Mardochée qui l'avait adoptée pour fille, ne
demanda pas autre chose que ce que désigna Egée, eunuque du roi et
gardien des femmes ; mais Esther plut aux yeux de tous ceux qui
la virent.
16 Esther fut conduite auprès du roi Assuérus, dans
sa maison royale, le dixième mois, qui est le mois de Tébeth, la
septième année de son règne.
17 Le roi aima Esther plus que
toutes les femmes, et elle obtint grâce et faveur auprès de lui
plus que toutes les jeunes filles. Il mit le diadème royal sur sa
tête, et la fit reine à la place de Vasthi.
18 Le roi donna un
grand festin à tous ses princes et à ses serviteurs, le festin
d'Esther ; il accorda du repos aux provinces et fit des
largesses avec une munificence royale.
19 La seconde fois
qu'on rassembla des jeunes filles, Mardochée était assis à la
porte du roi.
20 Esther n'avait fait connaître ni sa naissance ni
son peuple, selon que Mardochée le lui avait ordonné ; et
Esther suivait les ordres de Mardochée, comme lorsqu'elle était
élevée par lui.
21 En ces jours-là, comme Mardochée était
assis à la porte du roi, Bagathan et Tharès, deux eunuques du roi,
gardes du palais, poussés par la colère, voulurent porter la main
sur le roi Assuérus.
22 Mardochée eut connaissance du complot et
il en informa la reine Esther, qui le redit au roi de la part de
Mardochée.
23 Le fait ayant été examiné et trouvé exact,
les deux eunuques furent pendus à un bois, et cela fut
écrit dans le livre des Chroniques en présence du roi.
1 Après ces choses, le roi Assuérus éleva en dignité Aman,
fils d'Amadatha, du pays d'Agag ; il l'éleva et plaça son
siège au-dessus de tous les chefs qui étaient auprès de
lui.
2 Tous les serviteurs du roi, qui se tenaient à sa
porte, fléchissaient le genou et se prosternaient devant Aman, car
ainsi l'avait ordonné le roi à son sujet. Mais Mardochée ne
fléchissait point le genou et ne se prosternait point.
3 Les
serviteurs du roi, qui se tenaient à sa porte, dirent à
Mardochée : " Pourquoi transgresses-tu l'ordre du
roi ? "
4 Comme ils le lui répétaient chaque jour
et qu'il ne les écoutait pas, ils en informèrent Aman, pour voir si
Mardochée persévérerait dans sa résolution, car il leur avait dit
qu'il était Juif.
5 Aman vit que Mardochée ne fléchissait pas
le genou et ne se prosternait pas devant lui ; et Aman fut
rempli de fureur.
6 Mais il dédaigna de porter la main sur
Mardochée seul, car on lui avait appris de quel peuple était
Mardochée ; et Aman voulut détruire le peuple de Mardochée,
tous les Juifs qui se trouvaient dans tout le royaume d'Assuérus.
7
Le premier mois, qui est le mois de Nisan, la douzième année du roi
Assuérus, on jeta le PUR, c'est-à-dire le sort, devant Aman, pour
chaque jour et pour chaque mois, jusqu'au douzième mois,
qui est le mois d'Adar.
8 Alors Aman dit au roi Assuérus :
" Il y a dans toutes les provinces de ton royaume un peuple
dispersé et vivant à part parmi les autres peuples, ayant
des lois différentes de celles de tous les autres
peuples, et n'observant pas les lois du roi. Il n'est pas de
l'intérêt du roi de le laisser en repos.
9 Si le roi le trouve
bon, qu'on écrive l'ordre de les faire périr, et je
pèserai dix mille talents d'argent entre les mains des
fonctionnaires, pour qu'on les porte au trésor du roi. "
10
Le roi ôta son anneau de son doigt et le remit à Aman, fils
d'Amadatha, du pays d'Agag, ennemi des Juifs ;
11 et le roi
dit à Aman : " L'argent t'est donné et ce
peuple aussi, pour que tu en fasses ce qui te paraîtra
bon. "
12 Les secrétaires du roi furent appelés le
treizième jour du premier mois, et l'on écrivit, conformément à
tous les ordres d'Aman, aux satrapes du roi, aux gouverneurs de
chaque province et aux chefs de chaque peuple, à chaque province
selon son écriture, et à chaque peuple selon sa langue. Ce fut
au nom du roi Assuérus que l'on écrivit, et on scella l'édit
avec l'anneau royal.
13 Des lettres furent envoyées par les
courriers dans toutes les provinces du roi, pour qu'on détruisit,
qu'on égorgeât et qu'on fît périr tous les Juifs, jeunes et
vieux, petits enfants et femmes, en un seul jour, le treizième du
douzième mois, qui est le mois d'Adar, et qu'on pillât leurs
biens.
*** Voir le texte de l'édit, fragment IV,
chapitre 13, 1-7 ***
14 Une copie de l'édit, qui
devait être publié comme loi dans chaque province, fut adressée
ouverte à tous les peuples, afin qu'ils fussent prêts pour ce
jour-là.
15 Les courriers partirent en toute hâte, d'après
l'ordre du roi. L'édit fut aussi publié dans Suse la capitale ;
et, tandis que le roi et Aman étaient assis à boire, l'agitation
régnait dans la ville de Suse.
1 Mardochée, ayant appris tout ce qui se passait, déchira
ses vêtements, se revêtit d'un sac et se couvrit la tête
de cendre ; puis il alla au milieu de la ville en poussant avec
force des gémissements amers.
2 Et il se rendit jusque devant la
porte du roi ; car nulle personne revêtue d'un sac n'avait le
droit de franchir la porte du roi.
3 Dans chaque province, partout
où arrivaient l'ordre du roi et son édit, il y eut un
grand deuil parmi les Juifs ; ils jeûnaient, pleuraient et se
lamentaient, et le sac et la cendre servaient de couche à beaucoup
d'entre eux.
4 Les servantes d'Esther et ses eunuques
vinrent lui apporter cette nouvelle, et la reine fut très
effrayée. Elle envoya des vêtements à Mardochée pour s'en
revêtir, afin qu'il ôtât son sac ; mais il ne les
accepta pas.
5 Alors Esther, ayant appelé Athach, l'un
des eunuques que le roi avait placés auprès d'elle, le chargea
d'aller demander à Mardochée ce que c'était et d'où
venait son deuil.
6 Athach se rendit auprès de
Mardochée, qui se tenait sur la place de la ville, devant
la porte du roi ;
7 et Mardochée lui fit connaître tout ce
qui lui était arrivé, et la somme d'argent qu'Aman avait promis de
peser pour le trésor du roi en retour du massacre des Juifs.
8 Il
lui remit aussi une copie de l'édit publié dans Suse en vue de leur
extermination, afin qu'il le montrât à Esther, lui apprît
tout, et lui commandât de se rendre chez le roi afin de le
supplier et de lui demander grâce pour son
peuple.
*** Voir l'exhortation de Mardochée à
Esther, fragment VI, ch. 15, 1-3 ***
9 Athach vint
rapporter à Esther les paroles de Mardochée.
10 Esther donna
l'ordre à Athach d'aller dire à Mardochée :
11
" Tous les serviteurs du roi et le peuple de ses provinces
savent que si quelqu'un, homme ou femme, pénètre chez le roi, dans
la cour intérieure, sans avoir été appelé, l'unique loi qu'on lui
applique porte peine de mort ; à moins que le roi, lui tendant
son sceptre d'or, ne lui donne la vie. Et moi, je n'ai pas été
appelée à aller auprès du roi depuis trente jours. "
12
Quand les paroles d'Esther eurent été rapportées à Mardochée,
13
celui-ci lui fit répondre : " Ne t'imagine pas en
toi-même que tu échapperas seule d'entre tous les Juifs,
parce que tu es dans la maison du roi.
14 Car, si tu te
tais maintenant, il surgira d'ailleurs un secours et une délivrance
pour les Juifs, et toi et la maison de ton père, vous périrez. Et
qui sait si ce n'est pas pour un temps comme celui-ci que tu es
parvenue à la dignité royale ? "
15 Esther
fit répondre à Mardochée :
16 " Va, rassemble
tous les Juifs qui se trouvent à Suse, et jeûnez pour moi, sans
manger ni boire pendant trois jours, ni la nuit ni le jour. Moi
aussi, je jeûnerai de même avec mes servantes, puis j'entrerai chez
le roi, malgré la loi ; et si je dois mourir, je mourrai. "
17
Mardochée s'en alla, et il fit tout ce qu'Esther lui avait
ordonné.
*** Voir la prière de Mardochée et
d'esther, fragment V, ch. 13, 8-18 puis ch. 14, 1-19 ***
*** Voir un autre récit de la venue d'Esther auprès
d'Assuérus, fragment VII, ch. 15, 4-19 ***
1 Le
troisième jour, Esther revêtit ses vêtements royaux et se tint
dans la cour intérieure de la maison du roi, devant l'appartement du
roi. Le roi était assis sur son trône royal dans l'appartement
royal, en face de l'entrée du palais.
2 Lorsque le roi vit la
reine Esther debout dans la cour, elle trouva grâce à ses yeux, et
le roi tendit à Esther le sceptre d'or qu'il tenait à la main.
Esther, s'approchant, toucha le bout du sceptre.
3 Et le roi lui
dit : " Qu'as-tu, reine Esther, et que demandes-tu ?
Quand ce serait la moitié du royaume, elle te serait donnée. "
4
Esther dit : " Si le roi le trouve bon, que le roi
vienne aujourd'hui avec Aman au festin que je lui ai préparé. "
5
Le roi dit : " Qu'on appelle de suite Aman,
pour faire ce qu'a dit Esther. "
Le roi se rendit
avec Aman au festin qu'Esther avait préparé.
6 Au festin du vin,
le roi dit à Esther : " Quelle est ta demande ?
Elle te sera accordée. Que désires-tu ? Quand ce serait la
moitié du royaume, tu l'obtiendras. "
7 Esther répondit
et dit : " Voici ma demande et mon désir :
8
si j'ai trouvé grâce aux yeux du roi et s'il plaît au roi
d'accorder ma demande et d'accomplir mon désir, que le roi vienne
avec Aman au festin que je leur préparerai, et demain je ferai au
roi la réponse qu'il demande. "
9 Aman sortit ce
jour-là content et le cœur joyeux. Mais lorsqu'il vit, à la porte
du roi, Mardochée qui ne se levait ni ne bougeait devant lui, il fut
rempli de colère contre Mardochée.
10 Aman se contint néanmoins
et s'en alla chez lui. Puis, ayant envoyé chercher ses amis et
Zarès, sa femme,
11 Aman leur parla de la magnificence de ses
richesses, du grand nombre de ses fils, et du haut rang que le roi
lui avait conféré, en l'élevant au-dessus de ses princes et de ses
serviteurs.
12 " Je suis même le seul, ajouta-t-il, que
la reine Esther ait admis avec le roi au festin qu'elle a préparé,
et je suis encore invité pour demain chez elle avec le roi.
13
Mais tout cela ne peut me suffire, aussi longtemps que je verrai
Mardochée, le Juif, assis à la porte du roi. "
14
Zarès, sa femme, et tous ses amis lui dirent : " Qu'on
prépare un bois haut de cinquante coudées, et demain matin demande
au roi qu'on y pende Mardochée, et tu iras joyeux au festin avec le
roi. " Cet avis plut à Aman, et il fit préparer le bois.
1 Cette nuit-là, le roi, ne pouvant trouver le sommeil, se
fit apporter le livre des annales, les Chroniques. On en fit lecture
devant le roi,
2 et l'on trouva le récit de la révélation que
Mardochée avait faite au sujet de Bagathan et de Tharès, les deux
eunuques du roi, gardes du palais, qui avaient voulu porter la main
sur le roi Assuérus.
3 Le roi dit : " Quelle
marque d'honneur et quelle dignité a-t-on données à Mardochée
pour cela ? " — " Il n'en a reçu
aucune ", répondirent les serviteurs du roi qui étaient
en fonction près de lui.
4 Et le roi dit : " Qui
est dans la cour ? " — Or Aman était venu dans
la cour extérieure de la maison du roi, pour demander au roi de
faire pendre Mardochée au bois qu'il avait préparé pour
lui. —
5 Les serviteurs du roi lui répondirent :
" C'est Aman qui se tient dans la cour. " Et le
roi dit : " Qu'il entre ! "
6
Aman étant entré, le roi lui dit : " Que faut-il
faire pour l'homme que le roi veut honorer ? " Aman se
dit en lui-même : " Quel autre le roi voudrait-il
honorer de préférence à moi ? "
7 Et Aman dit au
roi : " Pour l'homme que le roi veut honorer,
8 il
faut prendre un vêtement royal dont le roi s'est revêtu, et un
cheval que le roi a monté et sur la tête duquel est posée une
couronne royale,
9 remettre ce vêtement et ce cheval à l'un des
principaux chefs du roi, puis revêtir l'homme que le roi veut
honorer, le promener à cheval à travers la place de la ville, et
crier devant lui : C'est ainsi qu'il est fait à l'homme que le
roi veut honorer ! "
10 Le roi dit à Aman :
" Prends sans tarder le vêtement et le cheval, ainsi que
tu l'as dit, et fais ainsi pour Mardochée, le Juif, qui est assis à
la porte du roi ; ne néglige rien de tout ce que tu as
indiqué. "
11 Aman prit le vêtement et le cheval, il
revêtit Mardochée et le promena à cheval à travers la place de la
ville, en criant devant lui : " C'est ainsi que l'on
fait à l'homme que le roi veut honorer ! "
12
Mardochée retourna à la porte du roi, et Aman se hâta de se
rendre chez lui, désolé et la tête voilée.
13 Aman
raconta à Zarès, sa femme, et à tous ses amis tout ce qui lui
était arrivé. Ses sages et sa femme Zarès lui dirent : " Si
Mardochée, devant lequel tu as commencé de tomber, est de la race
des Juifs, tu ne pourras rien contre lui, mais tu
succomberas certainement devant lui. "
14 Comme ils lui
parlaient encore, les eunuques du roi arrivèrent et emmenèrent en
hâte Aman au festin qu'Esther avait préparé.
1 Le roi et Aman allèrent au festin d'Esther.
2 Ce second
jour, le roi dit encore à Esther, lorsqu'on fut au festin
du vin : " Quelle est ta demande, reine Esther ?
Elle te sera accordée. Quel est ton désir ? Quand ce serait la
moitié du royaume, tu l'obtiendras. "
3 La reine Esther
répondit : " Si j'ai trouvé grâce à tes yeux, ô
roi, et si le roi le trouve bon, accorde-moi la vie : voilà ma
demande ; accorde-la à mon peuple : voilà mon
désir.
4 Car nous sommes vendus, moi et mon peuple, pour être
détruits, égorgés, anéantis. Encore si nous étions vendus pour
devenir esclaves et servantes, je me tairais ; mais maintenant,
l'oppresseur ne peut compenser le dommage fait au roi. "
5
Le roi Assuérus prenant la parole, dit à la reine Esther :
" Qui est-il et où est-il celui que son cœur pousse à
agir ainsi ? "
6 Esther répondit :
" L'oppresseur, l'ennemi, c'est Aman, ce méchant ! "
Aman fut saisi d'effroi en présence du roi et de la reine.
7 Le
roi, dans sa colère, se leva et quitta le festin du vin
pour aller dans le jardin du palais ; et Aman resta
pour demander grâce de la vie à la reine Esther, car il
voyait bien que, du côté du roi, sa perte était assurée.
8
Lorsque le roi revint du jardin du palais dans la salle du festin du
vin, il vit Aman qui s'était prosterné sur le lit
sur lequel était Esther ; et le roi dit : " Quoi !
ferait-il violence à la reine chez moi, dans le palais ? "
Cette parole était à peine sortie de la bouche du roi
qu'on voila le visage d'Aman.
9 Harbona, l'un des eunuques, dit
devant le roi : " Voici que le bois préparé par Aman
pour Mardochée, qui a parlé pour le bien du roi, est dressé dans
la maison d'Aman, à une hauteur de cinquante coudées. "
Le roi dit : " Qu'on y pendre Aman ! "
10
Et l'on pendit Aman au bois qu'il avait préparé pour Mardochée. Et
la colère du roi s'apaisa.
1 Ce même jour, le roi Assuérus donna à la reine Esther la
maison d'Aman, l'ennemi des Juifs, et Mardochée se présenta devant
le roi, car Esther avait fait connaître ce qu'il était pour elle.
2
Le roi ôta son anneau, qu'il avait repris à Aman, et le donna à
Mardochée ; et Esther établit Mardochée sur la maison
d'Aman.
3 Ensuite Esther parla de nouveau en présence du
roi ; se jetant à ses pieds, elle le supplia avec larmes
d'écarter les effets de la méchanceté d'Aman, du pays
d'Agag, et des projets qu'il avait formés contre les Juifs.
4 Le
roi tendit le sceptre d'or à Esther, qui se releva et se tint debout
devant le roi.
5 " Si le roi le trouve bon, dit-elle, et
si j'ai trouvé grâce devant lui, si la chose paraît convenable au
roi et si je suis agréable à ses yeux, qu'on écrive pour révoquer
les lettres conçues par Aman, fils d'Amadatha, du pays d'Agag, et
écrites par lui dans le but de faire périr les Juifs qui sont dans
toutes les provinces du roi.
6 Car comment pourrais-je voir le
malheur qui atteindrait mon peuple, et comment pourrais-je voir
l'extermination de ma race ? "
7 Le roi Assuérus
dit à la reine Esther et au Juif Mardochée : " Voici
que j'ai donné à Esther la maison d'Aman, et il a été pendu au
bois pour avoir étendu la main contre les Juifs.
8 Vous, écrivez
en faveur des Juifs comme il vous plaira, au nom du roi, et scellez
avec l'anneau du roi ; car une lettre écrite au nom du roi et
scellée avec l'anneau royal ne peut être révoquée. "
9
Les secrétaires du roi furent alors appelés, le vingt-troisième
jour du troisième mois, qui est le mois de Sivan, et l'on écrivit,
conformément à tout ce qu'ordonna Mardochée, aux Juifs, aux
satrapes, aux gouverneurs et aux chefs des provinces, des cent
vingt-sept provinces situées de l'Inde à l'Ethiopie, à
chaque province selon son écriture, à chaque peuple selon sa
langue, et aux Juifs selon leur écriture et selon leur langue.
10
On écrivit au nom du roi Assuérus, et l'on scella avec l'anneau
royal. On expédia les lettres par l'intermédiaire de courriers à
cheval, montés sur des coursiers de l'Etat, provenant des haras du
roi.
11 Par ces lettres, le roi permettait aux
Juifs, en quelque ville qu'ils fussent, de se rassembler et de
défendre leur vie, de détruire, de tuer et de faire périr, avec
leurs petits enfants et leurs femmes, les troupes de chaque peuple et
de chaque province qui les attaqueraient, et de livrer leurs biens au
pillage,
12 et cela en un seul jour, dans toutes les
provinces du roi Assuérus, le treizième jour du douzième
mois, qui est le mois d'Adar.
*** Voir le texte de
l'édit, fragment VIII, ch. 16, 1-24. ***
13 Une
copie de l'édit, qui devait être publié comme loi dans chaque
province, fut adressée ouverte à tous les peuples, afin
que les Juifs fussent prêts ce jour-là à se venger de leurs
ennemis.
14 Aussitôt les courriers, montés sur des
coursiers de l'Etat, partirent en toute hâte, d'après l'ordre du
roi.
L'édit fut aussi publié dans Suse, la capitale.
15
Mardochée sortit de chez le roi avec un vêtement royal bleu et
blanc, une grande couronne d'or, et un manteau de byssus et de
pourpre ; et la ville de Suse témoignait sa joie par des cris
d'allégresse.
16 Il n'y avait pour les Juifs que bonheur et joie,
jubilation et gloire.
17 Dans chaque province et dans chaque
ville, partout où arrivaient l'ordre du roi et son édit, il y eut
pour les Juifs de la joie et de l'allégresse, des festins et des
fêtes. Et beaucoup de gens d'entre les peuples du pays se firent
Juifs, car la crainte des Juifs les avait saisis.
1 Au douzième mois, qui est le mois d'Adar, le treizième
jour du mois, où devaient s'exécuter l'ordre et l'édit du roi,
jour où les ennemis des Juifs avaient espéré dominer sur eux, ce
fut le contraire qui arriva, et les Juifs dominèrent sur leurs
ennemis.
2 Les Juifs se rassemblèrent dans leurs villes, dans
toutes les provinces du roi Assuérus, pour frapper ceux qui
cherchaient leur perte, et personne ne put leur résister, car la
crainte qu'ils inspiraient s'était répandue chez tous les
peuples.
3 Tous les chefs des provinces, les satrapes, les
gouverneurs, les fonctionnaires du roi soutinrent les Juifs, car la
crainte de Mardochée pesait sur eux.
4 Car Mardochée était
puissant dans la maison du roi, et sa renommée se répandait dans
toutes les provinces, car cet homme, Mardochée, allait toujours
grandissant.
5 Les Juifs frappèrent donc à coup d'épée
tous leurs ennemis ; ce fut un massacre et une
destruction ; ils traitèrent comme il leur plut ceux qui leur
étaient hostiles.
6 Dans Suse, la capitale, les Juifs tuèrent et
firent périr cinq cents hommes,
7 et ils massacrèrent
Pharsandatha, Delphon, Esphatha,
8 Phoratha, Adalia, Aridatha,
9
Phermestha, Arisaï, Aridaï et Jézatha,
10 les dix fils d'Aman,
fils d'Amadatha, l'ennemi des Juifs. Mais ils ne mirent pas la main
au pillage.
11 Le jour même, le nombre de ceux qui avaient
été tués dans Suse, la capitale, parvint à la connaissance du
roi.
12 Et le roi dit à la reine Esther : " Les
Juifs ont tué et fait périr dans Suse, la capitale, cinq cents
hommes et les dix fils d'Aman ; que n'auront-ils pas fait dans
le reste des provinces du roi ?... Quelle est ta demande ?
Elle te sera accordée. Quel est ton désir ? Il sera
accompli. "
13 Esther répondit : " Si le
roi le trouve bon, qu'il soit permis aux Juifs qui sont à
Suse d'agir encore demain selon le décret d'aujourd'hui, et que l'on
pende au bois des dix fils d'Aman. "
14 Le roi ordonna
de faire ainsi, et l'édit fut publié dans Suse. On pendit les dix
fils d'Aman,
15 et les Juifs qui se trouvaient à Suse,
s'étant rassemblés de nouveau le quatorzième jour du mois d'Adar,
tuèrent dans Suse trois cents hommes. Mais ils ne mirent pas la main
au pillage.
16 Les autres Juifs qui étaient dans les
provinces du roi se rassemblèrent pour défendre leur vie et obtenir
que leurs ennemis les laissassent en repos ; ils tuèrent
soixante-quinze mille de ceux qui leur étaient hostiles. Mais ils ne
mirent pas la main au pillage.
17 Ces choses arrivèrent
le treizième jour du mois d'Adar. Les Juifs se reposèrent
le quatorzième, et ils en firent un jour de festin et de joie.
18
Les Juifs qui se trouvaient à Suse, s'étant rassemblés le
treizième et le quatorzième jour, se reposèrent le quinzième, et
ils en firent un jour de festin et de joie.
19 C'est pourquoi les
Juifs de la campagne, qui habitent des villes sans murailles, font du
quatorzième jour du mois d'Adar un jour de joie, de festin et de
fête, où l'on s'envoie des portions les uns aux autres.
20
Mardochée écrivit ces choses, et il envoya des lettres à tous les
Juifs qui étaient dans toutes les provinces du roi Assuérus, à
ceux qui étaient près comme à ceux qui étaient loin,
21 pour
leur enjoindre de célébrer chaque année les quatorzième et
quinzième jours du mois d'Adar,
22 comme étant les jours où ils
avaient obtenu d'être laissés en repos par leurs ennemis,
et le mois où avaient été changés leur tristesse en joie et leur
deuil en jour de fête ; on devait donc faire de ces
jours des jours de festin et de joie, où l'on s'envoie des portions
les uns aux autres, et où l'on distribue des dons aux
indigents.
23 Les Juifs adoptèrent pour usage, ce
qu'ils avaient déjà commencé à faire et ce que Mardochée leur
écrivit.
24 Car Aman, fils d'Amadatha, du pays d'Agag, ennemi de
tous les Juifs, avait formé contre les Juifs le projet de les perdre
et il avait jeté le PUR, c'est-à-dire le sort, afin de les
exterminer et des détruire.
25 Mais Esther s'étant
présentée devant le roi, celui-ci ordonna par écrit de faire
retomber sur la tête d'Aman le méchant projet qu'il avait
formé contre les Juifs, et on le pendit au bois avec ses fils.
26
C'est pourquoi on appela ces jours PURIM, du nom de PUR. Ainsi,
d'après tout le contenu de cette lettre, d'après ce qu'ils en
avaient eux-mêmes vu et ce qui leur était arrivé,
27 les Juifs
établirent et adoptèrent pour eux, pour leurs descendants et pour
tous ceux qui s'attacheraient à eux, la coutume irrévocable
de célébrer chaque année ces deux jours, selon le rite prescrit et
au temps fixé.
28 Ces jours devaient être rappelés et célébrés,
de génération en génération, dans chaque famille, dans chaque
province et dans chaque ville, et ces jours des PURIM ne devaient
jamais être abolis au milieu des Juifs, ni le souvenir s'en effacer
dans leur postérité.
29 La reine Esther, fille d'Abihaïl,
et le Juif Mardochée écrivirent une seconde fois, de la manière la
plus pressante, pour confirmer cette lettre sur les PURIM.
30 On
envoya des lettres à tous les Juifs, dans les cent vingt-sept
provinces du royaume d'Assuérus : des paroles de paix et de
fidélité,
31 et la recommandation de maintenir ces
jours des PURIM au temps fixé, comme le Juif Mardochée et la reine
Esther les avaient établis pour eux, et comme ils les
avaient établis pour eux-mêmes et pour leurs descendants, avec les
jeûnes et leurs lamentations.
32 Ainsi l'ordre d'Esther établit
ces observances des PURIM, et cela fut écrit dans le livre.
1 Le roi Assuérus établit un tribut sur le continent et les
îles de la mer.
2 Tous les faits concernant sa puissance et ses
exploits, et les détails sur la grandeur à laquelle le roi éleva
Mardochée, cela n'est-il pas écrit dans le livre des Chroniques des
rois de Médie et de Perse ?
3 Car le Juif Mardochée était
le premier ministre du roi Assuérus, considéré en même temps
parmi les Juifs, aimé de la multitude de ses frères, recherchant le
bien de son peuple et parlant pour le bonheur de toute sa race.
Ici finit le texte hébreu
Fragments
complémentaires conservés seulement dans la version grecque
4 Alors Mardochée dit : " C'est Dieu qui a
fait toutes ces choses !
5 Je me souviens en effet du songe
que j'ai eu à ce sujet ; aucun trait de la vision
n'est resté sans accomplissement :
6 la petite source qui
devint un fleuve, et la lumière qui se fit, et le soleil et la masse
d'eau. Le fleuve, c'est Esther, que le roi a prise pour femme et
qu'il a faite reine.
7 Les deux dragons, c'est moi et Aman.
8
Les nations sont ceux qui s'étaient réunis pour détruire le nom
des Juifs ;
9 et mon peuple, c'est Israël qui a crié vers
Dieu et qui a été sauvé. Ainsi le Seigneur a sauvé son peuple, et
il nous a délivrés de tous ces maux ; Dieu a fait des miracles
et de grands prodiges, comme il n'est est point arrivé parmi les
nations.
10 A cet effet, il a préparé deux sorts : un pour
le peuple de Dieu et un pour toutes les nations.
11 Et ces deux
sorts sont venus à l'heure, au temps et au jour du jugement, marqués
devant Dieu pour toutes les nations.
12 Et Dieu s'est souvenu de
son peuple, et il a rendu justice à son héritage.
13 Et ces
jours du mois d'Adar, le quatorzième et le quinzième de ce mois,
seront célébrés par eux en assemblée, avec joie et
allégresse devant Dieu, durant les générations, à perpétuité,
dans Israël, son peuple. "
1 La quatrième année du règne de Ptolémée et de
Cléopâtre, Dosithée, qui se disait prêtre et de la race de Lévi,
ainsi que Ptolémée, son fils, apportèrent cette lettre des
Phrouraï, qu'ils dirent être authentique et avoir été traduite
par Lysimaque, fils de Ptolémée, résidant à Jérusalem.
2 La seconde année du règne d'Assuérus, le grand roi, le
premier jour du mois de Nisan, Mardochée, fils de Jaïr, fils de
Séméi, fils de Cis, de la tribu de Benjamin, eut un songe.
3
C'était un Juif qui demeurait dans la ville de Suse, homme illustre
et attaché à la cour du roi.
4 Il était du nombre des captifs
que Nabuchodonosor, roi de Babylone, avait transporté de Jérusalem
avec Jéchonias, roi de Juda.
5 Voici quel fut son songe :
Soudain on entendit des voix, un grand bruit et des
tonnerres ; la terre trembla et fut bouleversée.
6 Puis
soudain deux grands dragons s'avancèrent, tous deux prêts à
combattre.
7 Ils firent entendre un grand cri et, à leur voix,
toutes les nations se préparèrent à la lutte, pour combattre le
peuple des justes.
8 Puis soudain, ce fut un jour de ténèbres et
d'obscurité ; il y eut angoisse, détresse, tribulation et
grande épouvante sur la terre.
9 Le peuple entier des justes,
craignant pour lui tous les maux, était dans le trouble et
se préparait à périr.
10 Ils crièrent vers Dieu et, à leurs
cris, il y eut comme une petite source d'où sortit un grand fleuve,
une masse d'eau.
11 La lumière et le soleil brillèrent ;
ceux qui étaient dans l'humiliation furent élevés, et ils
dévorèrent ceux qui étaient dans les honneurs.
12 S'étant
réveillé après avoir vu ce songe et ce que Dieu avait résolu de
faire, Mardochée le retint gravé dans son esprit et,
jusqu'à la nuit, il fit tous ses efforts pour le comprendre.
1 Puis Mardochée demeura à la cour avec Bagathan et Tharès,
les deux eunuques du roi, gardiens de la porte du palais.
2 Ayant
connu leurs pensées et pénétré leurs desseins, il découvrit
qu'ils s'étaient proposés de porter la main sur le roi Assuérus,
et il en donna avis au roi.
3 Celui-ci fit mettre à la question
les deux eunuques et, sur leur aveu, les envoya au supplice.
4 Le
roi fit écrire dans les Chroniques ce qui s'était passé, et
Mardochée en consigna aussi par écrit le souvenir.
5 Et le roi
ordonna qu'il exercerait un office dans le palais, et il lui donna
des présents pour sa dénonciation.
6 Mais Aman, fils
d'Amadatha, l'Agagite, était en grand honneur auprès du roi, et il
chercha à perdre Mardochée et son peuple à cause des deux eunuques
du roi.
1 Voici la copie de cette lettre :
" Assuérus,
le grand roi, aux satrapes et aux gouverneurs des cent vingt-sept
provinces, de l'Inde à l'Ethiopie, lesquels sont soumis à ses
ordres, mande ce qui suit :
2 " Quoique je
commande à un très grand nombre de nations et que j'aie soumis tout
l'univers, je veux, non pas abuser de ma puissance pour
m'enorgueillir, mais, par un gouvernement toujours clément et doux,
assurer continuellement à mes sujets une vie sans trouble ; et,
procurant à mon royaume le calme et la sécurité jusqu'à ses
extrêmes frontières, faire refleurir la paix chère à tous les
mortels.
3 Ayant donc demandé à mes conseillers de quelle
manière mes intentions pouvaient être réalisées, l'un d'eux,
nommé Aman, qui excelle parmi nous en sagesse, qui est connu pour
son dévouement inaltérable et sa fidélité constante, et qui
occupe la seconde place dans le royaume,
4 m'a fait connaître
qu'il y a un peuple mal intentionné, mêlé à toutes les tribus qui
sont sur la terre, en opposition avec tous les peuples au nom de ses
lois, méprisant continuellement les commandements des rois, de façon
à empêcher la parfaite harmonie de l'empire que nous dirigeons.
5
Ayant donc appris que ce seul peuple, en contradiction perpétuelle
avec tout le genre humain, s'en séparant par le caractère étrange
de ses lois, et mal affectionné à nos intérêts, commet les
derniers excès et empêche ainsi la prospérité du royaume,
6
nous avons ordonné que ceux qui vous sont désignés dans les
lettres d'Aman, lequel est à la tête des affaires et honoré
comme notre second père, soient tous, avec femmes et enfants,
radicalement exterminés par le glaive de leurs ennemis, sans aucune
miséricorde ni clémence, le quatorzième jour du douzième mois, le
mois d'Adar, de la présente année ;
7 afin que ces
hommes, autrefois et maintenant encore hostiles, descendant le même
jour, par mort violente, aux enfers, rendent pour les temps à venir
à nos affaires une prospérité et une paix parfaites ".
8 Et Mardochée pria le Seigneur, se souvenant de toutes ses
œuvres.
9 Il dit :
" Seigneur, Seigneur,
Roi tout-puissant, toutes choses sont soumises à votre pouvoir, et
il n'est personne qui puisse Vous faire obstacle, si Vous avez résolu
de sauver Israël.
10 C'est Vous qui avez fait le ciel et la
terre, et toutes les merveilles qui sont sous le ciel.
11 Vous
êtes le Seigneur de toutes choses et nul ne peut Vous résister, à
Vous le Seigneur !
12 Vous connaissez toutes choses et Vous
savez que ce n'est ni par insolence, ni par orgueil, ni par quelque
désir de gloire que j'ai agi en ne me prosternant pas devant le
superbe Aman,
13 car volontiers, pour le salut d'Israël, je
serais prêt à baiser les traces mêmes de ses pas.
14
Mais je l'ai fait pour ne pas mettre l'honneur d'un homme au-dessus
de l'honneur dû à mon Dieu ; et jamais je ne me
prosternerai devant un autre que Vous, mon Seigneur, et ce n'est pas
par orgueil que j'agirai de la sorte.
15 Maintenant donc, Seigneur
mon Dieu et mon Roi, Dieu d'Abraham, ayez pitié de
votre peuple, parce que nos ennemis jettent les yeux sur
nous pour nous perdre et veulent détruire votre antique héritage.
16
Ne méprisez pas votre lot, que Vous avez racheté pour Vous de la
terre d'Egypte. Exaucez ma prière !
17 Soyez favorable à
votre part d'héritage et changez notre deuil en joie, afin que,
conservant la vie, nous célébrions votre nom, Seigneur, et ne
fermez pas la bouche de ceux qui vous louent. "
18
Tout Israël cria aussi vers le Seigneur de toutes
ses forces ; car ils avaient la mort devant les yeux.
1 La reine Esther aussi, se sentant placée en un
extrême péril de mort, eut recours au Seigneur.
2 Quittant ses
vêtements splendides, elle prit des habits d'angoisse et de deuil ;
à la place de ses parfums précieux, elle se couvrit la tête de
cendre et de poussière, affligea durement son corps et, s'arrachant
les cheveux, elle en remplissait tous les lieux où elle avait
coutume de se livrer à la joie.
3 Et elle adressa cette prière
au Seigneur, Dieu d'Israël :
" Mon Seigneur,
qui êtes seul notre Roi, assistez-moi dans mon délaissement, moi
qui n'ai, pas d'autre secours que Vous ;
4 car le danger qui
me menace, je le touche déjà de mes mains.
5 J'ai
appris dès mon bas âge, au sein de ma tribu paternelle, que Vous,
Seigneur, avez pris Israël de préférence à toutes les nations, et
nos pères de préférence à tous leurs ancêtres, pour votre
héritage éternel, et que Vous avez accompli en leur faveur toutes
vos promesses.
6 Et maintenant, nous avons péché en votre
présence, et Vous nous avez livrés aux mains de nos ennemis,
7
parce que nous avons rendu hommage à leurs dieux. Vous êtes juste,
Seigneur !
8 Et maintenant, il ne leur suffit plus de faire
peser sur nous une amère servitude, mais ils ont mis leurs
mains dans les mains de leurs idoles,
9 pour faire
serment d'abolir les décrets de votre bouche, d'anéantir votre
héritage, de fermer la bouche de ceux qui Vous louent, et d'éteindre
la gloire de votre temple et de votre autel,
10 afin que s'ouvre
la bouche des nations, pour louer la puissance des idoles et
célébrer à jamais un roi de chair.
11 Ne livrez pas, Seigneur,
votre sceptre à ceux qui ne sont rien, afin qu'ils ne se rient pas
de notre ruine ; mais faites retomber sur eux leur dessein et
faites un exemple de celui qui le premier s'est déchaîné contre
nous.
12 Souvenez-Vous de nous, Seigneur ;
faites-Vous connaître dans ce temps de notre affliction et
donnez-moi du courage, Roi des Dieux et Dominateur de toute
puissance !
13 Mettez de sages paroles sur mes lèvres en
présence du lion, et faites passer son cœur à la haine de notre
ennemi, afin qu'il périsse, lui et tous ceux qui ont les mêmes
sentiments.
14 Mais nous, délivrez-nous par votre main, et
assistez-moi, moi qui suis seule et n'ai que Vous, Seigneur !
Vous connaissez toutes choses,
15 et Vous savez que je hais la
splendeur des méchants, que j'ai horreur de la couche des
incirconcis et de tout étranger.
16 Vous savez la contrainte que
je subis, vous savez que j'ai en horreur l'insigne de mon
élévation, qui est posé sur ma tête aux jours où je
dois me laisser voir ; je l'ai en horreur comme un linge
souillé, et je ne le porte point aux jours que je puis passer dans
la retraite.
17 Votre servante n'a jamais mangé à la table
d'Aman, ni fait grand cas des festins du roi, ni bu le vin des
libations.
18 Jamais, depuis le jour où j'ai été amenée ici
jusqu'à maintenant, votre servante n'a goûté la joie, si ce n'est
en Vous, Seigneur Dieu, Dieu d'Abraham.
19 O Dieu, qui l'emportez
sur tous en puissance, exaucez la prière de ceux qui n'ont aucun
autre espoir ; délivrez-nous des mains des méchants
et tirez-moi de mon angoisse ! "
1 Il fit mander à Esther d'entrer chez le roi, afin
de lui adresser une supplication pour son peuple et sa patrie.
2
" Rappelle-toi, lui dit-il, les jours de ton
abaissement, et comment tu as été nourrie de ma main ;
car Aman, le premier après le roi, a parlé contre nous pour notre
perte.
3 Mais toi, invoque le Seigneur et parle pour nous au roi ;
sauve-nous de la mort ! "
4 Le troisième jour, ayant fini sa prière, Esther
quitta ses habits de pénitence, et revêtit les ornements de
sa dignité.
5 Dans tout l'éclat de sa parure, après avoir
invoqué Dieu, l'arbitre et le sauveur de tous, elle prit avec elle
les deux suivantes d'usage.
6 Elle s'appuyait sur l'une
comme pouvant à peine soutenir son corps délicat ;
7
l'autre suivait, relevant la longue robe de sa maîtresse.
8
Celle-ci, tout empourprée du puissant éclat de sa beauté, avait le
visage joyeux et l'air aimable ; mais la crainte lui serrait le
cœur.
9 Ayant donc franchi toutes les portes, elle se
présenta devant le roi. Assuérus était assis sur son
trône royal, revêtu de tous les insignes de sa majesté, tout
brillant d'or et de pierres précieuses ; son aspect
était terrible.
10 Lorsqu'il eut relevé sa tête rayonnante de
gloire et lancé un regard étincelant de colère, la reine tomba en
défaillance, changeant de couleur et s'inclinant sur l'épaule de la
servante qui marchait devant elle.
11 Alors Dieu changea
la colère du roi en douceur ; inquiet, il s'élança de son
trône et soutint Esther dans ses bras, jusqu'à ce qu'elle
eût repris ses sens, calmant sa frayeur par des paroles
amicales :
12 " Qu'as-tu donc, Esther ? lui
disait-il, je suis ton frère, aie confiance ;
13 tu ne
mourras point, car notre ordonnance est pour le commun de nos
sujets.
14 Approche ! "
15 Et levant le
sceptre d'or, il le lui posa sur le cou et lui donna un
baiser, en disant : " Parle-moi. "
16
Elle répondit : " Je vous ai vu, seigneur, comme un
ange de Dieu, et mon cœur a été troublé par la crainte de votre
majesté ;
17 car vous êtes digne d'admiration, seigneur, et
votre visage est plein d'amabilité. "
18 Comme elle
parlait, elle s'affaissa de nouveau, prête à
s'évanouir.
19 Le roi était consterné, et tous ses serviteurs
cherchaient à ranimer la reine.
1 Ce qui suit est la copie de cette lettre :
" Assuérus,
le grand roi, aux satrapes et aux chefs des cent vingt-sept
provinces, de l'Inde à l'Ethiopie, et à ceux qui ont à cœur nos
intérêts, salut !
2 " Plusieurs,
après avoir été comblés de distinctions par la grande bonté des
princes leurs bienfaiteurs, deviennent arrogants.
3 Non
seulement ils prennent à tâche d'opprimer nos sujets, mais,
incapables de porter le poids des honneurs, ils ourdissent des trames
contre leurs bienfaiteurs.
4 Ce n'est pas assez pour eux de bannir
la reconnaissance du milieu des hommes ; enflés par le fastueux
éclat d'une fortune inaccoutumée, ils vont jusqu'à se persuader
qu'ils pourront échapper à la justice vengeresse de Dieu, qui
toujours voit toutes choses.
5 Maintes et maintes fois, le langage
artificieux des hommes que l'amitié des princes avait
chargés d'administrer les affaires, a engagé dans d'irrémédiables
maux ceux qui étaient à la tête des empires, en les rendant
complices de l'effusion du sang innocent ;
6 les
fallacieux mensonges de la malice trompant ainsi la bienveillante
simplicité des gouvernants.
7 Et ce n'est pas seulement dans les
anciennes histoires — comme nous venons de le rappeler, —
que vous pourrez voir des actes impies dus à l'influence
pestilentielle de ceux qui exercent indignement le pouvoir ;
vous le pourrez mieux encore en examinant ce qui se passe
auprès de vous.
8 Il nous faut donc pourvoir à l'avenir, afin
d'assurer, en faveur de tous les hommes, la tranquillité et la paix
du royaume,
9 opérant les changements nécessaires et
jugeant avec prudence les choses qui se présentent à nous, afin
d'y faire face avec une constante équité.
10 " Vous
savez, en effet, comment Aman, fils d'Amadatha, un Macédonien,
vraiment étranger à la race des Perses et fort éloigné de notre
mansuétude, ayant été recueilli par notre hospitalité,
11
éprouva les effets de la bienveillance que nous portons à tous les
peuples, jusqu'à être appelé notre père et à voir tout le monde
se prosterner devant lui, comme possédant la dignité la plus proche
du trône royal.
12 Mais incapable de porter dignement
une si haute fortune, il s'étudia à nous priver de la royauté et
de la vie.
13 Par toutes sortes d'artifices et de mensonges, il
s'efforça de perdre et Mardochée, qui nous a sauvé et toujours
utilement servi, et Esther, la compagne irréprochable de notre
royauté, avec leur peuple tout entier.
14 De cette manière il
espérait nous surprendre dans l'isolement et livrer l'empire des
Perses aux Macédoniens.
15 Mais ces Juifs, voués à la mort par
le plus scélérat des hommes, nous avons reconnu qu'ils
n'étaient coupables d'aucune faute, mais qu'ils obéissent à des
lois très justes,
16 et qu'ils sont les enfants du Dieu très
haut, très grand et éternellement vivant, lequel, pour
nous comme pour nos ancêtres, conserve ce royaume dans l'état le
plus florissant.
17 " C'est pourquoi, vous ferez
bien de ne pas tenir compte des lettres envoyées par Aman, fils
d'Amadatha,
18 attendu que l'auteur de ces crimes a été pendu au
bois, avec toute sa maison, devant les portes de Suse ; Dieu,
Maître souverain de toutes choses, lui ayant infligé sans retard le
châtiment mérité.
19 Affichant la copie de la présente lettre
publiquement en tout lieu, permettez aux Juifs de suivre leurs lois
en toute liberté,
20 et prêtez-leur assistance, afin qu'ils
puissent repousser l'attaque de ceux qui, durant les jours
d'oppression, se sont élevés contre eux ; et cela, le
treizième jour du douzième mois, appelé Adar, en un même jour.
21
Car Dieu, le Maître de toutes choses, a changé, pour la race
choisie, ce jour de malheur en un jour d'allégresse.
22 Vous
donc, célébrez aussi ce grand jour avec toutes sortes de
réjouissances, comme une de vos fêtes solennelles, afin qu'il soit,
maintenant et dans l'avenir,
23 pour nous et pour tous ceux qui
sont affectionnés aux Perses, un gage de salut et au
contraire un souvenir de ruine pour ceux qui complotent contre
nous.
24 " Toute ville, et généralement toute
contrée qui n'aura pas suivi ces prescriptions, sera dévastée avec
fureur par le fer et le feu, de telle sorte qu'elle soit à
jamais, non seulement inaccessible aux hommes, mais encore abhorrée
des bêtes sauvages et des oiseaux.
" Que des copies
de ce décret soient exposées aux yeux dans toute l'étendue
de l'empire et qu'ainsi tous les Juifs soient prêts, pour le jour
susdit, à combattre leurs ennemis. "